19 décembre 2022
Mise en place des bordures vers le bas de la digue pour faire passer l'eau de manière controlée
Polder2CS
Lancé en septembre 2019, le projet de recherche Interreg Polder2CS a pour objectif de développer les connaissances et d’expérimenter des solutions de gestion sur le littoral du nord de la Manche. Dans un contexte d’élévation du niveau de la mer, l’enjeu est de définir des stratégies de long terme sur les espaces poldérisés.

logo du projet Le projet de recherche Polder 2CS réunit 13 partenaires hollandais, belges et français et de nombreux partenaires observateurs publics et privés [1], impliqués dans la gestion du littoral. Il vise à améliorer l’adaptation du littoral aux impacts du changement climatique et porte sur 4 enjeux principaux :

  • la défense face aux inondations et submersions,
  • la gestion de crise,
  • la connaissance des infrastructures
  • la construction d’une plateforme pour échanger entre scientifiques et public au sujet de la protection du littoral contre les submersions marines et les inondations.

 

Des essais sur Un polder de 6 km²

vue de l'ancienne digue du polder, proche de l'eau face à un port
Digue d'expérimentation du projet Polder2CS

Le projet bénéficie d’un terrain d’expérimentation exceptionnel à la frontière entre la Belgique et les Pays-Bas près d’Anvers, où un polder de 6 km² doit être rendu à la mer. Une nouvelle digue est en construction plus loin dans les terres, permettant de réaliser des essais de rupture ou de résistance sur l’ancienne digue de protection contre les marées, longue de 3 km, et ainsi de tester des solutions d’entretien, de réparation des digues ou de gestion des inondations.

Le Hedwige and Prosper polder peut être mis sous eau de façon contrôlée pour étudier le fonctionnement d’une inondation contrôlée et le comportement des ouvrages de protection, y compris dans des conditions extrêmes. La zone a été divisée en 11 sections pour réaliser différentes expérimentations.

La région des Deux Mers, qui s’étend du sud des Pays-Bas au nord de la France, est constituée de zones basses et est impactée plus fortement que prévu par le changement climatique. Le projet Interreg Polder 2CS vise à développer les capacités d’adaptation de ces territoires avec un volet important sur l’information des acteurs, habitants compris, au sujet des risques et des modes de gestion du littoral, ainsi qu’à identifier des solutions durables de préservation du littoral.

Des travaux sont menés sur la connaissance et l’amélioration des systèmes de protection (digues, polders, inondations contrôlées, …) et leur mise en œuvre, ainsi que sur l’élaboration d’une stratégie partagée notamment en matière de réponse d’urgence.

A travers ce projet, la collaboration entre les acteurs des pays partenaires sera renforcée, et une plateforme numérique favorisera les échanges et le partage des connaissances opérationnelles.

vue aérienne de la zone du polder
Hedwige and Prosper polder- Polder2CS

Pour développer la connaissance des risques d’inondation, le Cerema a contribué à plusieurs volets du projet, notamment la validation des solutions testées dans le cadre du projet, les essais de résistance des digues par inondation, les tests de rupture de digues ou de submersion suivies en temps réel selon différents scénarios, la diffusion des résultats au public de manière ciblée.

Le Cerema Hauts de France, Normandie Centre et le Cerema Mer et littoral sont impliqués dans le projet avec en particulier la mobilisation de deux équipes de recherche : HA (Hydraulique pour l’Aménagement) et ENDSUM (Évaluation Non Destructive des StrUctures et des Matériaux).

Ces essais permettront de réaliser des modèles plus précis pour prédire le mécanisme des inondations et le comportement des digues.

Des tests de submersion ont ainsi été réalisés d’octobre à décembre 2020 et en février-mars 2021 et ont permis d’améliorer les modèles de prédiction hydrodynamiques et d’érosion des digues. Ces tests contribuent à améliorer les connaissances, notamment sur les digues destinées à être débordées quand l’eau atteint un certain niveau, afin de réduire la charge sur les ouvrages en aval.

 

Les actions du Cerema

Observations géophysiques et de télédétection par drone sur l'ancienne digue du polder

Grâce aux images prises par un drone combinées à des mesures par la méthode ERT (Electrical Resistivity Tomography) pour déterminer la résistivité des différents matériaux présents dans la digue et à des mesures radar, un modèle topographique de la zone et de la digue a été mis au point.

Ces données sur la structure de la digue ont permis de construire un modèle 3D de la digue, nécessaire pour les expérimentations sur le site.

Modèle topographique de la digue
Modèle topographique de la digue - Crédit [2]

 

Modèles numériques de surverse

Plusieurs modèles numériques ont été testés pour reproduire le débordement de la digue et l’écoulement de l’eau. Des tests ont ensuite été réalisés in situ avec différentes configurations de digues, par exemple la présence ou non d’anomalies (arbre, talus, terriers, …), la présence de réparations antérieures et la hauteur d’herbe.

Ce travail qui va se poursuivre pour affiner les modèles numériques doit permettre de déterminer la profondeur de l’eau et la vitesse d’écoulement sur la pente d’une digue lors d’un débordement.

Les figures ci-dessous montrent d’une part le dispositif expérimental et d’autre part les résultats de modélisation obtenus par le Cerema (1D SVE et 2D Star CCM+). Les résultats du Cerema sont très proches des résultats obtenus par les autres équipes européennes.

vue de l'écoulement vers le bas de la digue en conditions controlées
comparaison entre les mesures et les modèles numériques de la vitesse et la hauteur d’eau. Les modèles numériques ’’ 1D SVE et 2D Star CCM+’’
Comparaison entre les mesures et les modèles numériques de la vitesse et la hauteur d’eau. Les modèles numériques ’’ 1D SVE et 2D Star CCM+’’ sont les
modèles développés au Cerema par l’équipe HA. - Crédit [3]

 

Conception de barrière temporaires anti-inondations destinées à protéger des digues

Cette expérimentation menée avec l’entreprise Cuirassier a pour objectif de tester au plus tard début 2022 un dispositif destiné à réduire la vitesse de propagation de l’eau et éviter la rupture d’une digue.

Ce dispositif consiste à positionner des barrières en haut de la digue, reliées par des tuyaux à un réservoir temporaire à l’arrière de la digue, qui permet de stocker de l’eau entre deux barrières. L’eau est pompée dans la partie submergée et envoyée dans le réservoir provisoire.

Le principe de l’expérimentation est encore en discussion avec les autres partenaires du projet et pourrait évoluer.

Schéma du dispositif envisagé (pompe, barrières temporaires sur la digue)
Schéma de l'expérimentation envisagée 

 

Des solutions pour les problématiques locales des partenaires observateurs

Plusieurs des partenaires observateurs accompagnent le projet en France font face à des problématiques liées à la gestion des digues, et collaborent avec le Cerema sur le plan technique.

Le groupe Salins qui produit du sel dans le Midi est confronté à l‘érosion du littoral et doit envisager des solutions durables pour préserver son activité, sans construire d’infrastructure lourde. Une solution proposée est de réaligner le trait de côte pour permettre le rechargement de la plage et des dunes. Une autre action consiste à tester la végétalisation du talus arrière avec des plantes adaptées au climat méditerranéen. Des travaux sont aussi envisagés pour favoriser le dépôt des sédiments du Rhône dans la zone des Salins.

Dans la Communauté d’agglomération des deux baies en Montreuillois, les dunes sont impactées par les méandres de la rivière Authie qui peuvent entraîner une érosion importante pouvant menacer l’arrière-pays situé le plus souvent sous le niveau de la mer. Dans cette région, un projet vise à réaliser un modèle de gestion du risque intégrant le comportement des ouvrages de protection.

A Grenoble, où la ville se trouve entre des montagnes et des digues protégeant d’une rivière, certaines zones sont inconstructibles. Des cartes de vulnérabilité ont été réalisées pour déterminer quel type de construction peut être mis en place et à quel endroit.

 

Une formation dans la baie de Somme

Le Cerema a organisé l'exercice (techniques d'inspection et démonstration de techniques de monitoring et de réparation de digues) en collaboration avec le syndicat mixte Baie de Somme, le Rijkswaterstaat (ministère néerlandais chargé des infrastructures) et Stowa (fondation néerlandaise sur la recherche sur l'eau).

Si les principales activités du projet européen Interreg 2 Mers Polder2C’s se sont déroulées sur le Hedwige ProsperPolder à la frontière entre les Pays-Bas et la Belgique, en fin de projet une série d'actions a été menée sur un site français, dans la baie de Somme, principalement dans le cadre du 2e axe sur la gestion de crise. Un exercice concernant la préparation, l’inspection en période normale (et la simulation d’un scénario de tempête décennale), l’évaluation de la situation et  le choix de la réponse d'urgence en cas de rupture de digue a ainsi été mené du 22 au 25 novembre 2022.

 

  • Article de présentation du projet Polder2CS :

     


    [1] Les partenaires observateurs représentent les territoires concernés. En France il y a Irstea Aix-Marseille, le Syndicat Mixte du Marais Poitevin Bassin du Lay, les DREAL Pays de la Loire et Hauts-deFrance, France Digues, la Compagnie des Salins du Midi, Grenoble-Alpes Métropole, le Syndicat Mixte Baie de Somme - Grand Littoral Picard (SMBSGLP), la Communauté d’Agglomération des 2 Baies en Montreuillois – CA2BM.

    [2] ISPRS Congress 2021 geophysical and uav-based observations over a flood defense structure : application to the polder2c’s experimental dike R. Antoine, C. Fauchard , V. Guilbert , B. Beaucamp , C. Ledun , C. Heinkele , L. Saussaye , S. Muylaert , W. Vancalster, D. Depreiter , P. Sergent

    [3] SimHydro 2021  how strong are our levees? hydraulic analysis based on polder2c’s project in situ testing S.J.H., Rikkert, C. Alleon, I. Khaldi, S. Shaiek, K. Verelst, M. Ebrahimi, S. Soares-Frazão, S. Kaidi, H. Smaoui, P. Sergent

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