14 octobre 2021
Autoroute A7 Vitrolles (13)
Le Cerema était présent au congrès de l'Idrrim les 4 et 5 octobre, pour présenter des travaux et outils dans le domaine de la route et des infrastructures. Les échanges étaient cette année axés sur le thème "Citoyens, Professionnels, Décideurs : face aux transitions, quel engagement collectif pour les infrastructures de mobilité ?"

Les enjeux de résilience et d'adaptation des infrastructures ont été au coeur des échanges de ce congrès de l'Idrrim. Eléments clés de l'aménagement des territoires, les infrastructures évoluent avec les besoins et modes de mobilité, elles intègrent les enjeux de transition écologique, et connaissent d'importantes innovations notamment grâce aux technologies numériques.

Plusieurs spécialistes du Cerema étaient présents à cet événement national qui réunit les acteurs publics et privés des infrastructures et de la mobilité.

 

Bilan de la crise sanitaire sur l’aménagement des infrastructures et les usages de mobilité

Marion Ailloud, responsable du secteur Espace public et voirie urbaine au Cerema, est intervenue lors de la première séance plénière portant sur les enjeux de transition liés aux infrastructures et aux mobilités. L’occasion de revenir sur les impacts de la crise sanitaire sur les pratiques de mobilité, en particulier le fort développement des modes actifs, et a permis d’identifier quelques perspectives en matière d’aménagement des infrastructures, en milieu urbain comme en territoires peu denses.

 

Retour sur les évolutions constatées pendant la crise sanitaire

Intervention de Marion Ailloud
Intervention de Marion Ailloud - Cerema

Avant la crise sanitaire, l’espace public urbain était déjà marqué par une volonté à tous niveaux de proposer des alternatives crédibles à la voiture individuelle, notamment pour les enjeux de santé (sédentarité, qualité de l’air) ou encore de qualité de vie des espaces publics :

  • Un fort développement des transports en commun, avec un travail sur leur insertion urbaine, plusieurs "appels à projets transports en commun" ;
  • Une recherche d’apaisement de la circulation : aires piétonnes, zones 30 et zones de rencontre ;
  • Un Plan vélo national en 2018 qui vise de tripler la part modale du vélo, l’amenant à 9 % en 2024 ;
  • Des démarches locales de planification orientées pour une meilleure prise en compte des modes actifs : plans de mobilité (qui ont remplacé les PDU) et plans de mobilité simplifiés avec un nouveau volet portant sur les modes actifs, schémas directeurs cyclables…

Mais un certain nombre de freins ralentissent le processus et rendent difficiles les changements de comportements.

Le premier confinement s’est accompagné d’une diminution forte de la circulation automobile (70 % selon la plateforme de suivi du trafic routier mise en place par le Cerema en 2020), ayant entraîné une amélioration de la qualité de l’air (moins d’oxydes d’azote). Les transports en commun ont été marqués par une "baisse de popularité" auprès des usagers.

Le besoin d’organiser la mobilité pour le déconfinement s’est affirmé, avec plusieurs défis à relever : éviter le retour massif à la voiture, trouver des alternatives aux transports collectifs qui ne permettraient pas d’absorber la demande habituelle tout en garantissant le respect des règles de distanciation.

 

Face à cette situation inédite, quels leviers ?

chaussée a voie centrale banalisée avec un vélo sur la bande cyclable de gauche
Chaussée à Voie Centrale Banalisée - Cerema

La marche et le vélo sont apparus comme des modes de déplacements particulièrement efficaces et résilients pendant la crise sanitaire ; ils se sont affirmés comme "modes de déplacements à part entière". Dans ce contexte marqué par une volonté commune des acteurs de l’aménagement d’accélérer leur développement, le Cerema a accompagné ce mouvement en produisant rapidement des outils méthodologiques (2 guides sur les aménagements provisoires en faveur des cyclistes et des piétons) et en diffusant largement ces nouvelles recommandations à travers différents webinaires et formations.

Des dizaines de collectivités ont ainsi reconfiguré leur voirie pour y intégrer des linéaires significatifs d’aménagements cyclables et piétons, de nouvelles capacités de stationnement, une réorganisation de certains carrefours au profit des modes actifs, etc. Avec l’appui du Cerema, certaines configurations innovantes ont été testées et évaluées.

Cette accélération des politiques cyclables s’est aussi accompagnée d’actions en faveur des piétons : extensions de zones à priorité piétonne, élargissements de trottoirs, apaisement de la circulation, aménagements des abords de certains équipements comme les écoles, etc.

 

Une accélération des politiques en faveur des mobilités actives : quelles perspectives pour les infrastructures de demain ?

Face aux évolutions constatées pendant la crise sanitaire, une question vient naturellement : ces modifications de comportement sont-elles durables ? Par rapport à 2019, on observe une augmentation de 28% en moyenne de la circulation des vélos (année 2020 hors confinement), avec une progression encore plus marquée début 2021 (source : plateforme nationale des fréquentations, Vélo & Territoires), et qui n’est pas cantonnée aux territoires urbains (hausse de 11 % en milieu rural).

Cette fréquentation en hausse ainsi que les résultats des premières enquêtes auprès des usagers des nouveaux aménagements invitent à penser que ces évolutions relèvent bien d’une "tendance de fond", et non de "sursauts" ponctuels. De même, en ce qui concerne la marche, les démarches visant à mieux prendre en compte les besoins des piétons (baromètre des villes marchables par exemple...) et à traiter les abords des écoles se multiplient depuis septembre 2021.

En ce qui concerne le développement de la pratique du vélo, les priorités portent sur le besoin de "continuités cyclables" et d’aménagements plus confortables et efficaces. Dans cette lignée, le Cerema a publié en mai 2021 un nouveau référentiel pour les aménagements cyclables.

 

En conclusion, le développement des modes actifs et en particulier de la pratique du vélo est toutefois conditionné à la capacité des acteurs à développer des infrastructures pour les modes actifs, qui soient sûres, capacitaires et inclusives.

  • Dans les métropoles et les grandes villes, il s’agira de développer des réseaux cyclables à haut niveau de services, de traiter les interactions (en particulier vélo/TC et piétons/vélos), d’aménager les carrefours pour que ces déplacements soient fluides, etc.
  • Dans les territoires peu denses, plusieurs défis sont à relever :
    • Intégrer les politiques en faveur du vélo et de la marche aux démarches de planification de la mobilité ;
    • Mobiliser les acteurs qui ont la compétence voirie pour passer de la planification à la mise en œuvre opérationnelle d’aménagements cyclables ou piétons ;
    • Développer des aménagements cyclables hors agglomération, tester et innover y compris sur des routes interurbaines, faire évoluer des réseaux jusque-là "routiers" avec des caractéristiques favorables aux cyclistes (ce qui peut impliquer sur certains axes où l’on souhaite conserver une cohabitation de questionner les vitesses autorisées) ;
    • Articuler modes actifs et transports collectifs, faciliter l’intermodalité (ex : modes actifs et co-voiturage), développer des services vélos

En complément des aménagements et des services destinés à développer la pratique des modes actifs, des actions d’animation et de communication sont à mettre en place pour favoriser les changements d’usage.

Les méthodes et outils pour le diagnostic de l'état des chaussées

Pascal Rossigny, responsable du Secteur Gestion de Patrimoine d’Infrastructures de Transport au Cerema, a présenté lors d'une intervention avec Pascal Trottier de Routes de France les outils et méthodes actuellement disponibles pour diagnostiquer l'état des chaussées.

 

Un état des lieux des outils pour les gestionnaires de réseaux

couverture du cahierCeux-ci ont été réunis dans un cahier spécial de 24 pages destiné aux gestionnaires de réseaux routiers, paru à l'occasion du congrès aux éditions du Cerema.

L'objectif est de les aider dans les choix à prendre face aux différents outils et technologies d’auscultations de chaussée actuellement disponibles sur le marché français.

Ces matériels et techniques sont présentés en fonction des différents besoins auxquels ils peuvent répondre:

  • Connaissance du patrimoine routier ;
  • Evaluation de l’état de patrimoine et suivi de son comportement ;
  • Programmation de l’entretien des chaussées ;
  • Diagnostic de chaussées ;
  • Contrôle et réception de travaux ;
  • Surveillance des réseaux et suivi de section.

Pour chaque métier de gestion de patrimoine (connaissance du patrimoine routier, évaluation de patrimoine et suivi de réseaux routiers, programmation de l’entretien des chaussées, diagnostic de chaussées, contrôle et réception de travaux, et enfin surveillance des réseaux et suivi de section), les matériels ont été présentés avec leurs avantages et les points de vigilance à prendre en considération.

 

Plusieurs leçons peuvent être tirées de cette étude :

Ces dernières années, les évolutions technologiques apportées aux techniques d’auscultation permettent aux gestionnaires d’acquérir des descripteurs de meilleure qualité, plus objectifs et répétables que ceux obtenus jusqu’à présent, et utilisables à des fins d’évaluation de patrimoine comme de suivi de section.

Pour autant, ces technologies ne sont pas nécessairement adaptées à tous les réseaux, ou tous les besoins des gestionnaires.

Un constat est fait sur la difficulté d’obtention de relevés visuels des dégradations homogènes et cohérents, en partie lié à la difficulté de l’exercice sur l’ensemble d’un réseau routier. De fait, le remplacement de tels relevés par des relevés automatiques aidera clairement à une amélioration de l’image de l’état d’un réseau routier.

Ce constat s’explique également par l’absence de procédure et d’organisme de qualification des opérateurs de relevés visuels des dégradations. Aucune habilitation n’est aujourd’hui demandée aux opérateurs. Les entreprises ont chacune leurs procédures de qualification ; elles mériteraient d’être validées par une instance. Une action portée par le Cerema est en cours pour répondre à ce besoin.

Il existe un décalage entre les dernières technologies d’auscultation et la doctrine méthodologique actuellement en vigueur :

  • en matière d’agrément des matériels (certification de la qualité des résultats fournis);
  • en matière de méthodologie de réalisation des mesures et d’exploitation des résultats.

De même que pour la qualification des opérateurs de relevés visuels, un dispositif de contrôle de la qualité des mesures fournies par les nouvelles technologies et une refonte méthodologique pourront permettre :

  • à l’entreprise d’assurer la qualité de sa prestation;
  • au gestionnaire, de s’assurer de la qualité de la prestation livrée.

De nouvelles problématiques accompagnent enfin l’usage de ces nouveaux appareils comme par exemple la gestion scientifique et informatique des données (organisation des données, format des fichiers, volume des données, géoréférencement, lien vers les SIG, etc.)

En savoir plus :