Les infrastructures linéaires de transport (ILT) sont parmi les principales causes de la fragmentation des territoires. Pour réduire cette fragmentation, l’aménagement de passages à faune (PAF), quand ils sont correctement implantés et dimensionnés, permet de rétablir un franchissement pour la faune en toute sécurité et de restaurer la transparence écologique (la perméabilité au regard des déplacements vitaux de la faune) de ces ILT.
Un système d'information sur tous les passages à faune à l'été 2023
Le système d’information sur les PAF (SIPAF) consistera à les recenser, et les localiser sur les différents réseaux routiers, ferroviaires et à terme sur les voies fluviales. Il permettra de connaître le patrimoine et de concourir à son entretien, d’assurer un suivi faunistique et de l’efficacité de ces passages, d’identifier les priorités d’intervention. Mais aussi d’informer les collectivités territoriales de leur existence pour leur prise en compte dans les documents d’urbanisme.
Un premier travail de recensement a été réalisé en 2005 (travaux du SETRA et des CETE) sur la structure d’une base de données (BDD) pour les routes nationales et les autoroutes.
En 2017, dans le cadre d’un appel à données de l’Allemagne pour un projet européen, une première cartographie Trame-Verte et Bleue nationale à partir de Schémas Régionaux de Cohérence Ecologique (SRCE) a été établie et a conduit à l’élaboration d’une base de données "brouillon" (travaux SETRA – CETE) et d’une carte nationale des PAF recensés cette année-là. 2018 marque le lancement du projet "Système d’Information des Passages A Faune" (SIPAF) dont le pilotage est assuré par la Direction de l'Eau et de la Biodiversité, sous-direction de la DGALN, et la Direction des Mobilités Routières, sous-direction de la DGITM. Le Cerema assure sa coordination technique, les parcs nationaux des Ecrins et des Cévennes, son développement technique. Les DIR , les Conseils Départementaux, SNCF Réseau, VNF, les sociétés concessionnaires d’autoroutes, les collectivités territoriales, les fédérations régionales de chasse et les associations naturalistes sont associés en tant que membres du comité des usagers qui a un rôle consultatif dans l’évolution du projet.
Cette base de données concerne toutes les ILT, y compris les canaux et différents types de passages faune :
- passages faunes spécifiques : passages petite faune (PPF) et passages grande faune (PGF),
- passages faunes mixtes : passages mixtes hydrauliques et routiers,
- les ouvrages non dédiés type viaduc.
Les ouvrages non dédiés (passages agricoles, forestiers, pédestres, routiers) présentant une fonctionnalité écologique potentielle ou réelle seront enregistrés lors d’une seconde phase.
Une série d'informations, appelés concepts, sera renseignée pour chaque PAF identifié : sur l’ouvrage en lui-même (type et caractéristiques), les objectifs (dont espèce cible), les différents aménagements associés (clôture, végétation), le gestionnaire, les suivis réalisés, la fonctionnalité.
Le SIPAF est fondé sur une adaptation des briques logicielles de GeoNature, outil d’open source développé par les parcs nationaux français. L’interface de saisie du SIPAF permettra de centraliser, gérer, consulter, filtrer, exporter et diffuser les informations renseignées. La mise en ligne du SIPAF est prévue pour fin juin 2023.
Un exemple d’application du SIPAF pour une espèce vulnérable : le Vison d’Europe
Le Vison d’Europe est un petit mammifère carnivore appartenant à la famille des Mustélidés. C’est l’une des espèces les plus menacées en Europe et en France. Il est classé "en danger critique d’extinction" (CR) sur les listes rouges nationale et mondiale de l’UICN. L’impératif de conservation du Vison d’Europe a amené la France à instaurer un plan national d’action (PNA)
La principale menace pesant sur cette espèce est due aux collisions routières. Le Vison d’Europe évite de se mettre à l’eau pour traverser un ouvrage hydraulique. Ainsi lorsqu’il suit le cours sur la berge et si elle est interrompue au niveau d’un pont, il grimpe le talus et traverse la chaussée avec un risque de collision. L’aménagement des ouvrages hydrauliques existants (banquettes, encorbellement) permettent au Vison de traverser dans l’ouvrage en toute sécurité.
Le SIPAF recensera les nouveaux ouvrages hydrauliques aménagés et les ouvrages existants ayant fait l’objet d’une requalification. Sa consultation sera utile dans le cadre du troisième PNA du Vison d’Europe (action n°4.2.). Elle permettra de visualiser l’ensemble de ces ouvrages ainsi que les secteurs où peu ou pas d’ouvrages sont encore aménagés dans la zone d’action du plan national d'action. La saisie des suivis réalisés sur ces ouvrages contribuera également à meilleure diffusion de l’information pour tous les acteurs impliqués pour rétablir le Vison d’Europe dans un état de conservation favorable.
La connaissance des secteurs où le risque de collision est réduit du fait de l’aménagement des ouvrages hydrauliques est un élément important pour une autre action du PNA 3 : la stratégie de translocation du Vison d’Europe, c’est-à-dire la réintroduction et/ou renforcement de populations en nature de Visons d’Europe nés en captivité dans les élevages conservatoires. La mise en œuvre de cette stratégie est capitale pour maintenir les populations sauvages de l’espèce.