11 décembre 2017
Senneville-sur-Fécamp
Retrouvez le bilan du deuxième atelier géothématique sur le thème des risques naturels et géomatique du 17 octobre à Grand-Quevilly.

Le second atelier géothématique organisé par le Cerema Normandie Centre s’est tenu le 17 octobre 2017. Le thème retenu était « risques naturels et géomatique » ou comment mettre les outils de la géomatique au service de la connaissance et de l’aide à la décision en matière de risques naturels.

À destination des chargés d’études, géomaticiens et administrateurs de données, cette journée a permis d’échanger sur l’actualité des risques naturels et de la géomatique et de partager expériences et méthodes utilisées sur plusieurs études. L’atelier géothématique était ouvert aux services techniques des collectivités, de l’État et des établissements publics, aux partenaires associatifs. Il a réuni plus de 80 personnes.

Jerôme Wabinski, directeur du Cerema Normandie-Centre, a introduit la journée en soulignant l’importance du dialogue entre thématiciens et géomaticiens pour la gestion des risques naturels. L’actualité récente avec l’ouragan Irma qui a frappé les Antilles rappelle l’importance de l’action publique dans la prévention et la gestion des catastrophes naturelles. L’un des enjeux est de disposer d’outils et de méthodes encore plus performants et innovants pour collecter, gérer, analyser, diffuser, partager et visualiser l’information spatio-temporelle, afin de réduire l’impact des catastrophes et aider à la prise de décision. Le programme de cette journée a été conçu grâce à la collaboration de la DDTM76 et la participation d’un panel large d’intervenants : collectivités, université, services de l’État et établissements publics.

Un premier temps centré sur des actions nationales

Jean-Jacques Richard de la DGPR (format pdf - 1.7 Mo - 14/12/2017) a présenté le plan à 5 ans des Systèmes d’Information de la DGPR avec un objectif principal de fédération et d’harmonisation nationale des portails et des sites métiers existants. Cette ré-organisation devrait être achevée en 2022. Elle est coordonnée par le superviseur des données du MTES. Sa mise en œuvre permettra de répondre à la loi pour une République Numérique et à la directive Inspire.

Ce plan s’articule en 4 pôles :

  • Risques technologiques : activités industrielles, pollution des sols (BASOL, BASIAS...), système d’information de l’inspection des installations classées (S3IC),
  • Prévision des crues : vigicrues, hydroportail + différentes applications pour permettre leur fonctionnement, systèmes collaboratif et participatif (crowd-sourcing),
  • Géorisques,
  • Interface avec le monde professionnel sur les risques diffus.

Les contributeurs sont les agents du MTES, les industriels, mais aussi le public dans le cadre du crowd-sourcing.

Robert Astoul de Météo-France a présenté le produit « Avertissement des événements intenses de précipitation (APIC) ».

Cet outil est destiné aux communes et aux préfectures qui sont alertées en même temps. Il a pour objectif d’envoyer des avertissements aux communes en fonction de l’importance de l’épisode pluvieux selon deux niveaux de sévérité : intense et très intense. Utilisable par abonnement volontaire, il s’agit d’un service gratuit à l’échelle des communes qui est ouvert depuis 2011 en métropole avec l’appui d’un plan média lancé vers les maires.
Une enquête réalisée en 2016-2017 a permis d’identifier de nouveaux besoins comme la compatibilité avec les smartphones, l’amélioration de la prévision immédiate et la demande de disposer de plus d’interconnexion avec d’autres produits existants.

Le second temps autour du risque “inondation”

Julien Defenouillère de la DREAL Normandie (format pdf - 7.5 Mo - 14/12/2017) est intervenu pour présenter le travail effectué par la DREAL Normandie pour modéliser les zones non saturées (zone du sous-sol comprise entre la surface du sol et la surface d’une nappe libre).

La méthodologie comporte trois étapes principales :

1. la cartographie des zones humides et des mares. L’identification est réalisée par numérisation après exploitation d’orthophotographies à différentes dates, à condition bien sûr que ces éléments soient visibles sur les clichés aériens. Les zones humides sont saisies ainsi que les zones d’émergence exceptionnelle de la nappe et les zones humides détruites. Des sorties sur le terrain permettent de conforter et de préciser les délimitations.

2. la cartographie de la piézométrie des nappes phréatiques, ce qui correspond à la forme du toit de la nappe. Toutefois, très peu de données piézométriques classiques (puits, forages) sont disponibles.

3. la cartographie de la différence entre la surface du sol (terrain naturel) et la surface de la nappe libre est effectuée à partir du RGE Alti.
En complément sur le littoral, les statistiques de niveaux marins extrêmes des côtes sont mobilisées.
Enrichie et vérifiée en continu par l’hydrogéologue, cette modélisation représente plutôt bien l’implantation de l’homme. Les résultats sont publiés sur Carmen à l’échelle communale (1/250000) ou localement au 1/10000 lorsque les données Lidar ont pu être utilisées.

Morgane Guilleux de la DDTM de Seine-Maritime (format pdf - 1.7 Mo - 14/12/2017) a présenté l’usage des SIG en gestion de crise inondations.

De nombreuses données en DDTM existent comme les PPR, les AZI, les TRI mais elles sont difficilement exploitables car peu digitalisées, peu structurées, parfois trop lourdes à être manipulées rapidement (Lidar). Et enfin il existe peu d’outils utilisant ces données pour répondre à la mission de référent départemental inondation (RDI).
La DDTM a un rôle d’appui à la préfecture en matière de prévention, de préparation et de gestion de crise ainsi que de gestion post-crise. Pour cela une organisation interne a été mise en place avec la constitution d’une équipe projet.

Un plan d’actions "RDI" a été défini en 2015 avec 3 priorités :

  • Priorité 1 : Structuration des données pour mise à disposition au cadre d’astreinte par l’intermédiaire d’un même outil et formation des cadres de permanence
  • Priorité 2 : Travail sur la submersion marine engagé et en cours de finalisation, Élaboration d’une fiche réflexe par bassin versant, Travail sur la Seine
  • Priorité 3 :Identification des secteurs prioritaires sur tous les bassins versants, Amélioration continue, formation, exercices, Retour d’expérience.

Le troisième temps de la journée était consacré aux risques littoraux

François Hédou du Cerema (format pdf - 3 Mo - 14/12/2017) a présenté l’indicateur national d’érosion côtière mis en place dans le cadre de la Stratégie Nationale de Gestion Intégrée du Trait de Côte (SNGITC). L’objectif de cet indicateur est d’identifier les zones naturelles du littoral français (métropole mais aussi outre-mer) les plus soumises au risque d’érosion côtière et ceci en appliquant une méthodologie unique pour permettre de disposer d’une vision nationale des enjeux.

Celle-ci repose sur les éléments suivants :

  • La création d’un cahier des charges précis définissant chaque marqueur pouvant délimiter le trait de côte
  • La mesure de l’écart entre deux traits de côte naturels : le premier historique, le second récent.

La numérisation a été réalisée par photo-interprétation de clichés "les plus anciens possibles" (autour de 1947) orthorectifiés pour le trait de côte historique et d’orthophotographies les plus récentes possibles comme l’ortho littorale par exemple.
À l’issue, l’utilisation du logiciel MobiTC du Cerema a permis de générer des transects séparés de 200m entre les deux traits de côte.

Cette donnée libre est consultable et accessible en téléchargement sur le site Géolittoral.

Arnaud Gruet de la DDTM de Seine-Maritime et Muriel Sauvé du Cerema (format pdf - 14 Mo - 14/12/2017) ont présenté ensuite une étude déclinant à une échelle locale l’indicateur national d’érosion côtière sur le littoral de la Seine-Maritime.
Ce littoral à falaises crayeuses est soumis à plusieurs phénomènes d’érosion. Cette étude a pour objectifs de proposer une projection du trait de côte actuel aux horizons 20 ans, 50 ans et 100 ans (compte tenu des données actuelles et à partir d’un certain nombre d’hypothèses), puis d’identifier les enjeux concernés, et enfin de sensibiliser les élus à ce phénomène naturel inéluctable.

Les étapes suivantes composent la méthodologie appliquée :

  • recensement des événements majeurs
  • identification des ouvrages majeurs obstacles aux déplacements des galets
  • à partir de ces éléments, mesure du recul du trait de côte tous les 50 mètres
  • projection du recul annuel estimé aux différents horizons
  • identification des enjeux à partir de différentes bases de données comme les fichiers fonciers par exemple.

Martin Boquet du Cerema Nord-Picardie (format pdf - 2.4 Mo - 14/12/2017) a présenté un usage possible des fichiers fonciers pour identifier les enjeux dans les zones soumises aux risques. Les fichiers fonciers sont une base de données issues des données fiscales de l’application MAJIC (Mise à jour des informations cadastrales). Ces données, retraitées et mises à disposition par le Cerema depuis 2009, offrent de nombreux avantages pour l’identification des enjeux fonciers ou bâtis dans les zones à risques : simplicité d’utilisation, couverture française, finesse d’échelle (géolocalisation au bâtiment ou à la parcelle), diffusion large et possibilité de conserver les données pendant 10 ans. L’utilisation associée de la base de données DV3F (croisement des fichiers DVF “diffusion des valeurs fiscales” et des fichiers fonciers) permet de s’intéresser à l’effet des risques sur les prix immobiliers. L’étude menée par le Cerema sur le littoral du Nord et de la Picardie ne permet pas de conclure sur un effet du risque de submersion marine sur les prix immobiliers : l’attrait du littoral reste le facteur clé de la formation des prix immobiliers.

Arnaud Thulie du Réseau d’observation du littoral Normand-Picard (Rolnp)) a présenté l’approche géographique du Rolnp pour valoriser l’information scientifique et technique sur le littoral de Normandie et des Hauts-de-France. Il a proposé une intervention utilisant comme support une Story Map d’Esri associant textes, cartes et contenu multimédia . Le Rolnp a été lancé en 2010 en partenariat avec le conservatoire du littoral, les régions Picardie, Haute-Normandie et Basse-Normandie. Son approche est plurisdiciplinaire avec un conseil scientifique associant différents partenaires (Cerema, SHOM...). Son objectif est de fournir des outils d’aide à la décision pour les politiques littorales sur les thématiques des risques naturels (érosion et submersion marine), de la dynamique côtière et de la biodiversité comme marqueur de la dynamique des milieux littoraux. Le portail du Rolnp propose notamment des ressources cartographiques et un catalogue de métadonnées sur 7 grandes thématiques : population, formes et géologie du littoral, dynamique et risques côtiers, contexte climatique, conditions hydrodynamiques et approche historique du littoral. Le Rolnp coordonne l’acquisition de données de références sur le littoral concernant la topographie et la bathymétrie avec pour objectif d’obtenir des données gratuites en licence libre.

Le quatrième temps de la journée était consacré aux risques “cavités et mouvements de terrain”

Candide Lissak, enseignante-chercheure à la Université de Caen, et Kévin Graff, doctorant (format pdf - 5.5 Mo - 14/12/2017) , ont présenté leur approche de la cartographie des risques liés au mouvement de terrain. Ils mettent en évidence l’intérêt du multisource et du choix des données à adapter en fonction des objectifs et de l’échelle d’analyse visés. Les travaux réalisés portent sur différents types de processus hydro-gravitaires en Normandie et dans les Alpes (glissements de terrain, écroulements, coulées de boue, coulée de débris) ayant des conséquences physiques et socio-économiques. L’équipe de Caen mobilise des approches à différentes échelles de la région au sous-bassin versant. Pour établir des cartographies d’aléas et caractériser l’évolution des sites, différents types de données quantitatives, semi-quantitatives et qualitatives sont combinées : bases de données à disposition (bases de données de l’IGN, données des documents d’urbanisme pour évaluer les conséquences des risques), données de terrain (mise en place de capteurs in situ, données GPS, radar, lidar, photogrammétrie, lasergrammétrie), données d’archives (cartes anciennes, cartes postales, photos). Les outils à mettre en œuvre sont adaptés à l’échelle d’analyse pour un résultat conciliant coût d’acquisition et qualité de l’information. L’objectif est de proposer des outils d’aide à la décision grâce à une évaluation quantitative des risques.

Le dernier temps de la journée est consacré au thème des cavités souterraines avec 2 présentations proposées par la DDTM et le CEREMA, suivies d’une table ronde.

Arnaud Quiniou et Sébastien Legros, chargés de mission au bureau des risques et nuisances de la DDTM76 (format pdf - 413.2 ko - 14/12/2017) ont présenté leur démarche de construction d’un SIG cavités souterraines sur la Seine-Maritime. La Seine-Maritime se caractérise par une densité importante de marnières (13 marnières/km2 dans le Pays de Caux). La DDTM dispose d’un volume important de données sur ces cavités, dont une grande partie sous format papier, disponibles en version scannée. Pour permettre une diffusion de ces données, notamment pour les missions ADS et planification, la DDTM s’est lancée dans la création d’un SIG cavités. La DDTM a présenté son projet de structuration et de visualisation des données mené en associant les partenaires (BRGM, Cerema, DREAL, collectivités, bureaux d’études). L’enjeu est de disposer de données SIG précises sur l’ensemble des communes de Seine-Maritime pour faciliter leur utilisation et leur mise à jour.

Aurélien Mempiot, chargé d’études cavités souterraines au Cerema Normandie-Centre(format pdf - 16 Mo - 14/12/2017) a présenté le travail réalisé au laboratoire régional de Rouen (LRR) en matière de cartographie des cavités souterraines sur un réseau autoroutier concédé. Une grande partie des 300km d’autoroute SAPN se situe sur des plateaux crayeux de la Seine-Maritime et l’Eure soumis à l’aléa cavités souterraines (bétoire, puisards et marnières). Le LRR intervient depuis 20 ans sur le réseau SAPN (environ 25 interventions curatives/an). Pour développer une approche préventive dans la gestion de ces cavités, l’étude présentée vise à constituer une vision générale du risque lié aux cavités souterraines sur le réseau. En première approche, les données disponibles sont capitalisées à l’échelle d’un fuseau d’étude de 1km, soit 3300 indices de cavités souterraines représentés. Les aléas sont ensuite définis, cartographiés et décrits sur un fuseau d’étude de 200m.

Plusieurs participants rejoignent la table ronde qui a réuni des producteurs et utilisateurs de données sur les cavités souterraines :

  • Baptiste Meire, BRGM : le BRGM récupère des données existantes sur les cavités pour les mettre en ligne sur le visualiseur InfoTerre et réalise des études ponctuelles sur les cavités.
  • Julien Boulanger, DDTM27 : la DDTM de l’Eure a réalisé un atlas de cavités souterraines, accessible en ligne via Géo-IDE, et met en application une doctrine départementale en matière d’urbanisme.
  • Florian Gettvert, DREAL Normandie : la DREAL met à disposition SIG cavités accessible au grand public sur son site internet et actualise régulièrement en fonction des données récupérées auprès des DDTM.
  • Romain Belloncle, Communauté de communes Caux Estuaire : la communauté de communes utilise principalement les données cavités souterraines dans ses missions en urbanisme (notamment instruction des permis de construire). La communauté de communes s’appuie principalement sur le recensement de la DDTM76, car les retours d’informations émanant des communes sont très faibles.
  • Caroline Merle et Stéphanie Debeaumont, Amiens Métropole (format pdf - 2 Mo - 14/12/2017)  : la communauté d’agglomération a constitué une base de données à partir des études réalisées sur le territoire de la métropole. Les données seront bientôt accessibles sur InfoTerre. Un exemple d’usage des données cavités pour l’aménagement d’un square illustre les problématiques autour du calage des données de sondage et de la précision des informations sur la cavité pour un comblement futur.

La table ronde s’est poursuivie avec des échanges autour de la capitalisation et l’actualisation des données cavités. Les DDTM sont incontournables pour les collectivités d’Eure et de Seine-Maritime pour la capitalisation de ces données. L’actualisation des données dans les SIG des DDTM et de la communauté Caux-Estuaire se fait au gré des nouveaux recensements d’indices de cavités menés sur des territoires communaux ou à l’occasion d’études ponctuelles réalisées par les bureaux d’études sur des indices. La base de données du BRGM est mise à jour une fois par an. Un projet de capitalisation des données à l’échelle régionale en Normandie serait une bonne chose, mais les doctrines départementales étant différentes, l’harmonisation semble compliquée à l’heure actuelle.

Pour une bonne capitalisation des informations, l’élaboration d’un socle commun faciliterait leur exploitation dans les outils inter-opérables existants (comme Géorisques en plus précis). Mais la mise à jour des données pour les collectivités (notamment les petites communes rurales), les professionnels de l’immobilier, le public demande une très grande réactivité. Ces acteurs sont intéressés par la position précise des indices et leurs périmètres de sécurité associés (doctrine départementale). La DDTM76 s’appuie sur des partenariats pour faciliter le recensement qui représente un gros volume de travail. La DGPR est prête à aider les acteurs locaux pour mettre à disposition des outils de saisie et de diffusion de la donnée (exemple d’un outil développé par le ministère pour aider les collectivités à recenser les canalisations enterrées). La commission régionale information géographique pourrait être sollicitée pour l’harmonisation des données à l’échelle régionale.

Pierre Bernat-Y-Vicens, directeur du département aménagement durable des territoires au Cerema Normandie-Centre, conclut cette journée riche et animée.

Les interventions de la journée ont mis en évidence tout le potentiel du croisement entre géomatique et risques naturels, notamment l’apport de la géomatique dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques. Plusieurs enjeux se sont dégagés des interventions et des échanges : autour de la donnée (qualité, précision, multiplicité des sources, harmonisation, socle commun de données), autour de l’organisation de la collecte d’information (partage des méthodes de travail, gestion des doublons, participation des citoyens) et autour de la mise à disposition des informations géographiques (partage avec les acteurs du territoire, multiplicité des portails d’information, interopérabilité). Le prochain atelier géothématique sera organisé en octobre 2018. Les participants sont invités à faire part des sujets qui pourraient être abordés à cette occasion.